#TheBigQuit : analyser la vague de démissions au vu des tensions sur le marché du travail
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October 11, 2022

Plus qu’une “Grande Démission”, nous assistons à une “Grande Migration”

Fin 2021 et début 2022, le nombre de démissions a atteint un niveau historiquement haut en France, avec près de 520 000 démissions par trimestre, dont 470 000 démissions de CDI. Nous avons interrogé Céline Jauneau, consultante RH senior afin d’avoir son avis sur ce phénomène appelé « grande démission ». D’abord palpable sur le marché du travail américain en 2021, il  est désormais évoqué en France.

Pouvez-vous rappeler ce qu'est le phénomène Big Quit ?

Suite aux premières vagues de la crise du Covid, le nombre de travailleurs quittant volontairement leur poste a nettement augmenté aux États-Unis, que ce soit pour changer de travail, chercher un autre emploi ou se retirer de la population active. Ce mouvement démissionnaire qui frappe massivement les États-Unis est arrivé, à moindre échelle, en France. Les salariés quittent leurs entreprises de manière volontaire, particulièrement les plus jeunes.

En France, quels sont les chiffres clés à retenir concernant le Big Quit ?

Le taux de démission a atteint 2,7 % en France au 1er trimestre 2022. Il est au plus haut depuis la crise financière de 2008-2009, mais reste en deçà des niveaux qu’il avait atteint juste avant, début 2008 (2,9 %). Sur les seules entreprises de 50 salariés ou plus, le taux de démission est parmi les plus élevés depuis 1993 : avec 2,1 %, il est toutefois inférieur à celui observé au début des années 2000 (2,3 % au 1er trimestre 2001).

Quel est le lien entre ce haut niveau du taux de démission et les difficultés de recrutement ?

Le niveau élevé des démissions est en effet à relativiser, au vu des tensions actuelles sur le marché du travail. Cette situation crée des opportunités pour les salariés déjà en poste et est susceptible en retour de conduire à des démissions plus nombreuses. Il y a clairement plus d’offres de job que de candidats. Et ceci est particulièrement vrai dans le secteur de l’industrie digitale dans lequel nous évoluons. Les talents en poste sont plus régulièrement chassés et il est tout à fait normal que ces derniers soient à l’écoute du marché et soient sensibles aux propositions professionnelles qui peuvent leurs être faites par des cabinets RH. Le contexte de forte demande de travail et d’offre limitée explique ce mécanisme de “débauchage”.

Donc selon vous, il faudrait mieux parler de "Grande migration" que de "Grande démission" ?

La situation de pénurie crée en effet des opportunités pour les salariés déjà en poste. Ce qui est susceptible de conduire à des démissions plus nombreuses pour les candidats chassés, et qui sont prêts à saisir les opportunités professionnelles qui s’offrent à eux. Surtout quand ces propositions de job sont assorties d’avantages non salariaux : télétravail à la carte, congés illimités, semaine de quatre jours, congés sabbatiques. Il est aujourd’hui impossible pour les entreprises de faire l’impasse sur les questions d’équilibre entre la vie professionnelle et la vie personnelle.

Lors de vos missions chez Capucine & Associés, privilégiez-vous également le recrutement de candidats déjà en poste ?

Notre job chez Capucine & Associés est de transformer un contact ciblé en candidat motivé. Nous sommes un cabinet de chasse et la majorité de nos candidats sont donc effectivement déjà en poste. Notre approche est extrêmement ciblée et très personnalisée. Le but n’est pas d’appeler tous les commerciaux d’une société par exemple, mais de cibler celui ou celle qui aura les capacités à prendre le poste. Nous ne faisons pas “de la quantité” mais du “one to one”. Notre réseau est étendu et nous informons notre communauté en priorité de nos nouveaux postes. Le but est de créer une relation de confiance, et sur le long terme, pas juste de faire un placement. Nous sommes avant tout partenaires de carrière pour nos candidats.

Comment cette situation impacte-t-elle le niveau des salaires des candidats ?

Le pouvoir de négociation s’est clairement modifié en faveur des salariés. Dans un contexte de difficultés de recrutement toujours élevées, les salaires sont susceptibles d’augmenter, en particulier pour les personnes nouvellement démissionnaires. Outre cet effet potentiel sur les salaires, les enquêtes Acemo-Covid montrent que, début 2022, certaines entreprises réalisent des concessions sur les conditions ou l’organisation du travail (télétravail) ou sur la forme des contrats d’embauche pour conserver ou attirer des salariés.

Justement, au-delà des salaires, que mettent les entreprises en place pour attirer les talents ?

La situation entraîne des hausses de salaires significatives, ce qui peut créer des déséquilibres au sein des équipes en place. Les entreprises doivent s’adapter et revoir leurs modes de fonctionnement. Instaurer plus de FlexOffice, affiner les perspectives d’évolution, réfléchir autour du SENS que les employés peuvent trouver dans leurs missions ou leur entreprise ; tous ces leviers sont stratégiques. Pour ce faire, les employeurs doivent se faire accompagner par des spécialistes pour élaborer des approches différentes et convertir des personnes en candidats, répondant au projet et aux valeurs de l’entreprise.

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